Beaucoup redoutaient un fiasco, mais contre toute attente l’OPEP a conclu à Vienne un accord visant à réduire sa production de pétrole de 1,2 million de barils par jour, pour plafonner à 33 millions de barils à compter du 1er janvier 2017. Alors que les précédentes réunions s’étaient soldées par des échecs successifs depuis 2014 et que les marchés du monde entier tablaient sur une augmentation indéfinie des prix à la pompe, il semble que l’intérêt commun ait eu raison des divergences entre l’Arabie Saoudite, l’Iran et l’Irak. C’est la première fois depuis 2008 que les 14 pays membres parviennent à conclure un tel accord avec pour objectif de soutenir les prix du pétrole et de réduire la surabondance des stocks ». Les marchés ont de leur côté réagi de manière spectaculaire au lendemain de l’annonce : le baril de Brent a sauté de 8 % et le WTI de 9 %.
L’OPEP signe un accord historique
Contre toute attente, l’OPEP s’est résignée à rééquilibrer le marché du pétrole qui souffre depuis quelques années d’une surabondance des stocks. En octobre dernier, le cartel avait produit 33,64 millions de barils. A partir de janvier 2017, la production sera réduite de « 1,2 millions de barils par jour, pour porter son plafond à 32,5 millions de barils par jour ». Même la Russie, plus grand producteur mondial de pétrole, a confirmé s’être engagée à réduire sa production de 300 000 barils par jour, pour ainsi contribuer à moitié à l’objectif de réduction en volume demandée aux pays extérieurs à l’OPEP. En effet, l’OPEP a aussi demandé aux pays non membres de l’organisation de porter une partie du fardeau, soit 600 000 barils par jour.
L’OPEP parvient à un accord, malgré les divergences internes
Pour le cartel, c’est l’accord du pragmatisme. Si jusqu’à présent l’Arabie Saoudite donnait le ton et que les autres pays suivaient, la réunion de Vienne a montré que les choses avaient bien changé. Les négociations ont été difficiles, mais la réunion d’Alger a préparé le terrain et aplani les tensions en vue d’un accord. Lors de la réunion de Doha en avril dernier, l’Arabie Saoudite avait refusé de réduire sa production dans le cas où elle était le seul pays à supporter ce fardeau. Ainsi, l’Iran et l’Irak étaient également sommés de réduire leur production.
Un accord de six mois reconductibles
L’effort consenti par les pays membres de l’OPEP est loin d’être négligeable : 1,2 millions de barils en moins seront produits chaque jour, dès le 1er janvier 2017, pour six mois reconductibles. Cela représente un gros compromis de la part de l’Arabie Saoudite, tandis que de son côté l’Iran jubile. En effet, l’Arabie Saoudite a accepté de réduire sa production de 10.5 à 10 millions de barils par jour, tandis que celle de Téhéran sera portée à 3,8 millions de barils par jour, bien au-dessus des prédictions de l’AIE qui tablaient sur 3,6 millions de barils par jour.
Les plus gros producteurs vont assurer l’essentiel de l’effort
Selon un document diffusé par l’OPEP, l’effort de réduction va reposer sur les plus gros producteurs de pétrole, à savoir l’Arabie saoudite (– 486 000), l’Irak (– 210 000), les Emirats arabes unis (– 139 000) et le Koweït (– 131 000). L’OPEP a pressé les pays non membres de participer à hauteur de 600 000 barils par jour. L’Irak a longtemps justifié le maintien de sa production par la guerre contre l’Etat islamique. Mais le pays a finalement accepté une réduction de 210 000 barils par jour, pour la porter à 4,3 millions de barils par jour. D’un autre côté, les Emirats arabes unis, le Koweit et le Qatar ont prévu une réduction cumulée de 300 000 barils par jour. Le solde restant sera réparti entre les autres membres. Même Moscou a consenti à faire un effort, en réduisant sa production de 300 000 barils par jour. Comme convenu, deux pays ont été exemptés de l’effort : d’un côté la Libye qui subit depuis quelques années une guerre civile des plus sanglantes, et le Nigeria, qui lutte contre les attaques rebelles constantes sur ses installations pétrolières du delta du Niger.
« C’est un accord historique, qui va certainement aider à rééquilibrer le marché et à réduire la surabondance des stocks de pétrole ». Mohammed Saleh al-Sada, Ministre qatari de l’Energie, Président de la conférence de l’OPEP.
Les experts doutent sur la partie « Non OPEP de l’accord »
Si les marchés ont très vivement réagi à l’annonce, les experts restent très sceptiques. Selon eux, il existe encore des incertitudes sur le niveau de production de l’Iran, sur la contribution des pays non Opep, ainsi que sur la façon dont le contrat sera appliqué. La production pourrait même grimper dans les pays exemptés, à savoir la Libye, le Nigeria, et les Etats-Unis. Ils sont aussi conscients que les membres de l’OPEP respectent rarement leur quota de production et que la Russie en particulier n’a jamais fait d’efforts afin de resserrer sa production.
Accord de Vienne : 2 mois de difficiles négociations
Le compromis a été signé après deux mois de discussions intenses et de navettes diplomatiques entre Moscou, Alger, Téhéran, Bagdad et Riyad. Il reflète l’accord de principe pris à Alger en septembre dernier lorsque les dirigeants de l’OPEP s’étaient mis d’accord pour faire descendre la production en dessous de 33 millions de barils par jour. La réunion d’Alger faisait elle-même suite à l’échec du sommet de Doha d’avril.
Les pays producteurs vont se surveiller mutuellement
L’accord a été signé, mais néanmoins aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect des modalités, et les pays producteurs se surveilleront mutuellement. Alors que certains pays comme l’Arabie Saoudite ont toujours joué le jeu, il y a toujours de mauvais élèves, la Russie en fait partie. Même si cette dernière a promis de baisser sa production de 1,2 millions de barils, ce chiffre est basé sur une production exceptionnellement haute.