Les opérations de fusion-acquisition qui ont cours aujourd’hui représentent bien souvent plusieurs dizaines de milliards de dollars, avec des conséquences qui se font sentir sur les marchés financiers, ainsi que sur la concurrence des secteurs et de l’emploi.
En effet, chaque opération doit répondre à des prérogatives spécifiques, mais il est possible d’identifier des traits communs. Aussi certains secteurs d’activité sont privilégiés par ce genre d’opération, en raison de leur très fort appétit capitalistique, comment notamment les télécommunications, le secteur bancaire, et l’industrie pharmaceutique.
Comcast et AT&T Broadband :
$76,1 milliards
En décembre 2001, le groupe Comcast a déboursé $76,1 milliards pour s’offrir l’activité « câble » d’AT&T, devenant ainsi le numéro 1 du secteur aux Etats-Unis. Cette fusion a permis de créer le premier système de télévision payant fournisseur de services de téléphonie et d’accès internet, et ce pour près de 22 millions d’abonnés. Avec cette fusion, la consolidation de la clientèle et l’enrichissement de l’offre des services sont devenus deux axes stratégiques du secteur des télécommunications.
Glaxo Welcome et Smithkline Beecham : $78,7 milliards
La fusion de ces deux laboratoires pharmaceutiques a donné naissance au numéro 2 de l’industrie de l’époque, juste derrière le groupe Merck. À partir de janvier 2000 jusqu’à décembre, les pourparlers avec les autorités de la concurrence européenne et américaine n’ont cessé et Smithkline a dû se résigner à céder des droits sur certains de ses produits.
Royal Dutch et Shell Transport :
$80,1 milliards
Le géant pétrolier a réuni les conseils d’administration de ses deux holdings dont l’une se trouve à Londres et l’autre à Amsterdam, pour une fusion des deux entités, avec un nouveau nom : Royal Dutch Shell Plc, société cotée à la Bourse de Londres qui conserve son siège aux Pays-Bas.
Exxon et Mobil : $80,3 milliards
A l’époque numéro 2 du secteur du pétrole et du gaz, Exxon rachète Mobil en 1998 et devient ainsi la première compagnie pétrolière au monde. Quinze ans plus tard, en 2013, le groupe a réalisé un chiffre d’affaire de $438 milliards et un résultat net de $32,5 milliards.
Si le bénéfice du groupe est en forte baisse depuis 3 ans, Exxon reste une des sociétés les plus rentables au monde dont la puissance doit beaucoup aux mouvements de concentration qui parsèment son histoire.
AT&T et Bell-South : $87,3 milliards
Le secteur des télécoms américains, hyper compétitif, est très propice aux opérations de fusion-acquisition, comme en témoigne le rachat de LinkedIn par Microsoft négocié en ce moment même. En 2006, AT&T créé le numéro 1 mondial du secteur en rachetant Bell South, et fusionne toutes les activités de téléphone fixe, mobile et câble. Plus tard en 2014, le groupe tentera de reprendre sa place de leader face à Verizon qui a également diversifié ses activités en rachetant Direct TV pour $48 milliards.
Warner Lambert racheté par Pfizer :
$100 milliards
Si cette fusion a créé le champion de l’industrie pharmaceutique toutes catégories confondues, c’est parce que les deux sociétés connaissaient à l’époque une croissance fulgurante, grâce à une recherche et développement centenaire. Pfitzer est alors le poids lourd du secteur qui s’intéresse aux produits phares de Warner Lambert, tels que les rasoirs Wilkinson ou les bains de bouche Listerine.
Royal Bank of Scotland, Fortis, et Santander rachètent ABN Amro : $100 milliards
Si c’est toujours aujourd’hui une opération largement critiquée et que la crise de 2008 a affaibli les banques ayant pris part à l’opération, le rachat d’ABN Amro par le pool bancaire RBS fut à l’époque porté aux nues par le marché.
Selon les députés britanniques, l’Autorité des Marchés aurait du être beaucoup plus regardante quant à cette opération. En effet, l’état britannique a été contraint de renflouer RBS en rachetant 81 % de son capital lors de la crise.
Verizon et Vodafone : $130 milliards
Après la crise de 2008, c’est en 2013 que les opérations de fusion-acquisition ont commencé à repartir, et c’est une fois de plus le secteur des télécommunications qui a ouvert la marché avec le rachat de 45 % des actions la filiale Verizon Wireless Verizon, ces actions étant alors détenues par Vodafone. Cette opération a permis au géant de consolider ses positions sur le marché américain, fort de 116 millions d’abonnés.
Time Warner et AOL : $181,6 milliards
Lorsque Time Warner et AOL fusionnent, c’est deux mondes qui se rencontrent, et un monde qui change. On a d’un côté AOL, champion d’internet et fournisseurs d’accès qui contrôle les réseaux de distribution, et de l’autre, une gigantesque société de contenus et divertissements. Alors que la bulle internet bat son plein, AOL a un chiffre d’affaires de $4,8 milliards en 1999 avec une capitalisation boursière de $164 milliards, soit deux fois les $73 milliards de Time Warner.
Certes, la complémentarité des activités exerce alors un pouvoir de séduction indéniable sur les actionnaires, mais la fusion sera un échec : la culture internet d’AOL ne réussira pas à s’adapter à la vision plus traditionnelle de l’éditeur de contenus. Résultat, en 2009 Time Warner annonce la mise en bourse d’AOL, ce qui met fin à cette union peu judicieuse et coûteuse.
Vodafone et Mannesmann : $202 milliards
En tête du classement, on retrouve une autre opération de l’année 1999. Le groupe industriel allemand Mannesman spécialisé dans les télécommunications et l’industrie automobile rachète l’opérateur mobile Orange UK, alors filiale du groupe hongkongais Hutchinson Whampoa.
Cette opération a menacé Vodafone qui a alors procédé à une offre publique de rachat très agressive envers Mannesman. Tout sera mis en œuvre par Vodafone cette année-là pour mettre la main sur l’allemand, jusqu’à la revente d’Orange France Telecom. Finalement, le groupe britannique arrivera à ses fins, pour réaliser la plus grosse opération de fusion-acquisition de l’histoire, chiffrée à $202 milliards.
« Il n’y a pas de modifications ni de ruptures réglementaires qui expliquent la propension actuelle des entreprises à engager des mouvements stratégiques de fusions-acquisitions. Il s’agit là d’un retour à la normale, après plusieurs années de crise. La liquidité est en outre abondante et bon marché ». François Kayat, associé-gérant chez Lazard.
2015 : année record pour les opérations de fusion-acquisition
En 2015, les opérations de fusion-acquisition se sont chiffrées à $2.300 milliards aux Etats-Unis, soit la moitié du marché mondial. C’est 4600 opérations qui ont été annoncées, du jamais vu depuis les années 1980 lorsque Thomson Reuters a commencé à mesurer le marché. Les banquiers d’affaires ont oublié la déprime post-crise de 2008, alors qu’en 2013 le marché mondial a rebondi. S’il n’y a pas eu davantage de fusions acquisitions en 2015 versus 2014 en nombre, les « méga-deals » sont de retour, avec notamment la fusion entre la pharmacie Pfizer et Allergan, ce qui a créé le numéro un mondial du secteur.
Goldman Sachs : reine éternelle du conseil en fusions-acquisitions
Selon Thomson Reuters, la célèbre banque d’affaires de Wall Street reste le leader du conseil en fusion acquisition au niveau mondial, avec pas moins de $1.728 milliards d’opérations. Morgan Staley et JPMorgan occupent respectivement les deuxièmes et troisièmes places.
Ces trois banques ont été dans tous les « méga deals », de Pfizer et Allergan à la fusion entre AB Inbev et SABMiller, jusqu’à celle entre Royal Dutch Shell et BG Group. En France, les trois institutions sont également bien classées, dans le top 10 des cabinets de conseils en fusion acquisitions. Ce classement est dominé par BNP Paribas, forte de $53 milliards de transactions.