Le Brexit est un sujet qui ne date pas d’aujourd’hui. Mais à cinq semaines du référendum, les grands financiers du G7 se rencontrent cette semaine au Japon, et se sont déjà mis d’accord sur le fait que la sortie de la Grande-Bretagne de l’UE présentait un risque à la fois pour les britanniques mais aussi pour l’économie mondiale déjà affaiblie. Le Brexit (ou British exit) impliquerait trop d’incertitudes, nuirait à l’économie britannique et porterait préjudice à l’Europe, ainsi qu’à ses valeurs démocratiques.
Brexit : le jeu en vaut-il la chandelle ?
Le Royaume-Uni a-t-il vraiment intérêt à quitter l’Union Européenne ? Rien n’est moins sûr. Cette adhésion doit être renégociée sur la base de traités bilatéraux, à l’instar des modèles suisses ou irlandais, mais les pays du G7 et les autres pays de l’Europe pourraient se montrer réticents à accorder des conditions préférentielles au Royaume-Uni. Le Brexit est donc un choix lourd de conséquences. Reste à savoir quel coût économique le Royaume-Uni serait prêt à payer pour retrouver une indépendance totale ?
La contribution du Royaume-Uni à l’UE déjà diminuée
Rappelons qu’au-delà des avantages accordés à la Grande-Bretagne pour ce qui est des travailleurs européens ou de la régulation de la City, le pays bénéficie d’un statut particulier au sein de l’UE, qui lui permet de ne contribuer que partiellement au budget européen. Ce rabais est estimé à 66 % du surplus entre sa contribution brute et ses bénéfices perçus. Cela ne représente pas moins de €3.8 milliards économisés, mais supportés d’un autre côté par les autres pays, tels que la France.
Outre-manche, l’économie dopée par le marché unique
Outre ce rabais, la Grande-Bretagne profite actuellement de l’ensemble des avantages économiques associés à l’appartenance à l’Union Européenne. D’après une étude publiée par le Centre for European Reforms en 2014, le Royaume-Uni a augmenté de 55 % ses échanges avec les pays membres depuis son entrée de l’UE. Son PIB par habitant a également grimpé de 20 % depuis cette date. Autre chiffre très significatif, l’isolement commercial du Royaume-Uni pourrait lui coûter entre et un et trois de points de PIB d’ici 2030, soit la somme rondelette de €313 milliards. Pour finir, le maintien dans l’Union Européenne représentait à peu près 4 à 5% du PIB du Royaume-Uni, soit 73 à €91 milliards, c’est-à-dire €3.540 pour chaque ménage. C’est donc sans surprise qu’on observe que 80 % de ses entreprises adhérentes souhaitent rester dans l’UE.
« Quelle que soit l’hypothèse envisagée, la Grande-Bretagne s’appauvrirait de façon permanente si nous quittions l’Union Européenne ». George Osborne, Ministre britannique des finances.
Démantèlement de l’Europe : conséquences économiques très graves pour la France
De la même manière que le Grexit à l’été 2015 (Grèce-UE), une éventuelle sortie de la Grande-Bretagne de l’UE pourrait représenter le début d’une série de déconstructions. Le temps où l’idée d’une Union Européenne forte, étrangère aux égoïsmes nationaux, semble à présent bien éloignée. C’est l’espace Schengen lui-même qui pourrait disparaitre sous l’effet conjugué de la crise migratoire et d’un départ de la Grande Bretagne. Cela marquerait la fin de l’UE et de ses principes fondamentaux, à savoir la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux.
Le secteur du tourisme français en première ligne
Des études récentes ont chiffré des pertes annuelles d’environ €13 milliards, soit 0.5 % du Pib français. Cela reviendrait donc à diviser la croissance française par deux, si on regarde les taux actuels. Le secteur du tourisme serait le premier touché, avec un impact immédiat sur les recettes, qui sont estimées entre 500 millions et €1 milliard par an. N’oublions pas que la France est la première destination touristique au monde, ce qui explique pourquoi les pertes pour l’économie française seraient désastreuses.
«La régulation européenne est un ‘fardeau’. C’est plus facile de faire du commerce avec l’Amérique qu’avec l’Europe, parfois». Graeme Macdonald, Directeur Général du constructeur britannique JCB.
Lourdes conséquences pour le Royaume-Uni
Les conséquences du Brexit pour le Royaume-Uni seraient dramatiques, que ce soit au niveau politique ou économique. Faisant partie du marché unique européen, le Royaume-Uni profite de tous les avantages qui en découlent, à savoir la libre circulation des personnes, des biens, des services, et des capitaux. Il n’existe donc pas de barrières douanières ou tarifaires à l’exportation. Si la Grande-Bretagne venait à sortir de l’UE, ce libre échange deviendrait obsolète, et elle perdrait le marché de l’Union Européenne tout entière, ainsi que les marchés internationaux avec lesquels l’UE possède des accords privilégiés. Bien évidemment, Londres pourrait signer de nouveaux accords commerciaux, mais ce scénario nécessiterait énormément de temps et coûterait très cher. En tant que membre de l’UE, le Royaume-Uni possède une influence importante dans les négociations internationales. Mais seul, il ne fait pas le même poids. Pour mentionner les points positifs, un «Brexit» permettrait au Royaume-Uni de maîtriser plus efficacement son flux migratoire, ce qui représente un fort argument, alors que la majorité des Britanniques considère que l’immigration est un problème majeur pour le pays. Le taux de croissance élevé au Royaume-Uni a en effet attiré un grand nombre de travailleurs européens. Autre argument souvent avancé par les euro-sceptiques, en cas de Brexit le Royaume-Uni se libérerait de toute contrainte réglementaire liée à l’UE. Un départ permettrait également de s’affranchir des €13,8 milliards de contributions annuelles au budget européen, combat de Margaret Thatcher.
L’économie britannique montre déjà des signes de ralentissement
Tous les signaux économiques indiquent un profond ralentissement de l’économie britannique à l’approche du référendum du Brexit qui aura lieu le 23 juin prochain. La livre sterling avait déjà reculé en début d’année, en signe d’avertissement. Selon le cabinet Deloitte, le « Brexit » est désormais le risque jugé le plus préoccupant pour les directeurs d’entreprises et entrepreneurs. Ainsi, pour la première fois en trois ans, la majorité d’entre eux envisage des coupes budgétaires et réductions d’effectifs au cours de l’année à venir. Certes, le brexit n’est pas la seule cause de ce ralentissement, mais ce dernier vient accentuer l’anxiété générale vis-à-vis de l’économie mondiale. 75 % des directeurs financiers souhaiteraient que le Royaume-Uni reste dans l’UE.