Le 6 décembre dernier, Amazon a annoncé l’ouverture de son premier supermarché connecté à Seattle. Baptisé Amazon Go, le magasin entièrement automatisé fonctionne grâce à l’intelligence artificielle. Vous n’y trouverez donc aucun caissier ou employé. Vous n’aurez même pas besoin de sortir votre porte-monnaie pour y régler vos achats, votre téléphone et l’application Amazon Go feront l’affaire. Cette technologie détecte automatiquement les produits sélectionnés et débitera votre compte. Par rapport aux caisses libre-service que l’on peut trouver dans les supermarchés actuels, cela représente un degré d’automatisation supplémentaire. Le principe des supermarchés Amazon Go est simple : vous choisissez vos produits et vous pouvez ensuite sortir directement du magasin, sans avoir à faire la queue pour payer à la caisse. Le tout sera automatiquement débité sur votre compte Amazon Prime. Selon certaines sources, Amazon pourrait ouvrir 2000 magasins de ce genre à travers les Etats-Unis.
Selon Jeff Bezos, Amazon Go est le futur du supermarché
Le premier supermarché Amazon Go a déjà ouvert ses portes à côté de son siège de Seattle cette année, dans un petit espace de seulement 170m2. Les employés du groupe pourront acheter des produits alimentaires ainsi que des plats à emporter, sans passer par la caisse. Pour le grand public toutefois, il faudra attendre 2017. Amazon Go n’est pas un supermarché comme les autres : il est doté de capteurs trouvés sur les voitures autonomes qui peuvent détecter automatiquement lorsqu’un client se saisit d’un produit, ou le remet en rayon. Cela permet des passages en caisse facilités, sans files d’attente. Le client se sert et sort du magasin. La seule condition est d’avoir préalablement installé l’application Amazon Go sur son smartphone, puis de le scanner en arrivant dans le magasin. A en croire le Wall Street Journal, Amazon prévoit également d’ouvrir un « drive » afin de récupérer les commandes effectuées en ligne. Si les tests sont concluants, 2000 autres magasins de ce genre pourraient être ouverts aux Etats-Unis.
Un retour au point de vente physique est inattendu
Tandis que la plupart des industriels de l’agroalimentaire investissent massivement sur le numérique pour l’achat et la livraison de produits, il parait incongru pour Amazon de faire le mouvement inverse. La firme de Seattle l’a bien compris, le commerce traditionnel a encore de beaux jours devant lui, surtout dans le domaine de l’alimentaire. Même si les dépenses alimentaires en ligne ont explosé ces dernières années, elles ne représentent qu’une part limitée du total des achats, à peu près 5% en 2020. Amazon compte bien s’attaquer à ce marché, après l’échec de l’épicerie en ligne Amazon Fresh qui a souffert d’un système de livraison trop complexe et peu adapté à une clientèle très sensible au visuel et au toucher. L’avantage incontestable d’Amazon est son avancée technologique qui lui permet aujourd’hui d’automatiser le commerce physique.
« Il y a quatre ans, nous nous sommes demandés s’il était possible de créer des magasins sans file d’attente et sans caisses et si nous pouvions repousser les frontières de la technologie pour créer des commerces où les clients pourraient simplement prendre ce qu’ils veulent et partir », Amazon dans la vidéo de présentation de son supermarché.
Amazon : prendre d’assaut le secteur agroalimentaire américain
La petite épicerie ne serait en fait qu’un premier pas sur la route des ambitions titanesques d’Amazon dans le secteur de l’agroalimentaire américain. Compte-tenu des faibles marges appliquées aux produits de la vie courante, la société a bien conscience qu’il sera impossible de tirer d’importants profits grâce à ses épiceries. Le but est de faire de ces magasins des points de convergence pour tous les consommateurs. En devenant inévitable et présent dans le quotidien des consommateurs, Amazon pourrait ainsi représenter la solution facile pour n’importe quel achat. En ouvrant ces épiceries, elle ajoute à son activité un intermédiaire entre le client et les entrepôts : il est plus facile et moins coûteux de livrer une boutique qu’un particulier.
Un autre enjeu réside dans le Drive Amazon
Alors que tout le monde a les yeux rivés sur la boutique Amazon Go, de l’autre côté de Seattle s’est dressé le futur Drive Amazon. Ce dernier permettra aux clients de réaliser leurs courses en ligne, pour ensuite les récupérer au point de livraison. L’atout ? Ajouter un livre ou un téléviseur à la commande, qui pourra être récupéré en même temps que les courses alimentaires. De quoi renouveler le monde de la grande distribution.
Un modèle hybride entre discounter alimentaire et commande en ligne
Si le magasin actuel est de taille modeste avec ses 170m2, la société imagine des magasins beaucoup plus grands. Le concept imaginé par Amazon est proche des magasins discount européens tels que Lidl, avec une sélection limitée de produits frais et bien évidemment de nombreuses interfaces tactiles. Grâce à une mise en place simple et spartiate, les coûts d’entretien des boutiques baissent. De plus, le nombre limité de marchandises assure de n’avoir aucun stock. La société Amazon est arrivée à cette conclusion en observant que les épiciers généraient 80 % de leurs revenus grâce à 20 % de leurs produits. En se concentrant sur ces produits à haut rendement, il est donc possible d’augmenter l’efficacité et la rentabilité.
Paiement mobile : déjà expérimenté par PayPal
Beaucoup d’acteurs ont déjà tenté de s’imposer sur le créneau du paiement par smartphone, qui est loin d’être une nouveauté. C’est le cas de PayPal, qui avait testé en 2013 aux Etats-Unis un système utilisant la technologie « Bluetooth low energy » qui permet de reconnaître le smartphone d’un client à l’entrée du magasin et opère la facturation en ligne. Pour PayPal, le projet est cependant resté au stade de l’expérimentation. Cet échec n’a pas découragé la firme de Jeff Bezos, qui a repris la même technologie pour son magasin de Seattle.
L’emploi américain est-il menacé ?
Selon les statistiques, il y aurait 3,4 millions de caissiers et caissières aux Etats-Unis, ainsi que 4,5 millions de vendeurs et vendeuses, auxquels il faut ajouter 2,4 millions d’ouvriers travaillant dans les centres de stockage et autres dépôts. C’est donc plus de 10 millions d’emplois qui pourraient devenir obsolètes dans les prochaines années si l’essor des magasins automatiques a lieu. D’après des économistes de l’Université d’Oxford, 47% des emplois américains pourraient être pris en charge par des robots d’ici 20 ans, les emplois à bas salaire ayant 83 % de chances d’être automatisés.